Ego 4

Ego4 ! [E]crin des [G]ouffres et de l'[O]r - 1 entité poétique, [4] auteurs (F.G.W.C) Poésie en vers ou de verre brisé, désillusion et élévation, irrévérence et nonchalance, prose aérienne ou aencrée dans les entrailles, le maudit et l'espoir, beat et beatitude, la beauté et la ruine...
Communauté du verbe et de la vision, à la recherche du vrai, jusque dans l'horreur, le corps, le lâcher prise, l'abject, la démence, la folie, la perte de contrôle et de repères, le jouir!"

19 juin 2007


Hector Pieterson (1964-16 juin 1976)



T’es déjà mort Hector, coupé en deux, dans les bras de Mbuyisa, ton petit corps feuille au vent et ton écume rouge aux lèvres. Quand je regarde la photo, j’entends encore le cri de ta sœur Antoinette, la main levée et ouverte, qui dit déjà stop. Plus tard dans les rues de l’affranchissement, tes frères prolongeront son geste en fermant leurs paumes, serrant ton souvenir dans leur poing.



Vous rentrez de l’école, toi et tes potes, avec la couleur du chant de résistance qui, papillon de sons, envahit l’air par saccades. Mais vous ne pouvez pas, on vous ordonne de vous disperser et votre hymne prend alors le ciel à la gorge, il s’envole libre et impertinent. Les balles sifflent et te font trébucher Hector, tu tombes terrassé par la douleur, le son bloqué dans ton cœur et, à terre, Hastings ne bouge déjà plus, les yeux figés dans les tiens.



J’ai les larmes au bord du souffle au pied de ton mausolée. Ici trois semaines avant que je ne naisse, ici on empêchait les enfants de chanter. Je suis gorgé de peine devant une pierre, je ne me l’explique guère, c’est ce lieu, ton histoire qui a mis le feu aux poudres. Tu as levé des armées d’hommes Hector. Ton image comme ta voix a gagné les continents, dépassé les fuseaux horaires et 30 ans plus tard, encore, un homme pleure devant ta tombe.



On a fait de toi un symbole de la résistance. Tu t’en fous, je me doute. Depuis le coeur ton rêve éternel, tu t’en moques sans doute ou alors ta conscience d’enfant est-elle devenue universelle quand on t’a adoubé martyr ? Tu as dû les plaindre aussi ces lâches qui battaient les tiens comme des chiens, tu as dû te demander comment l’on pouvait se haïr à ce point, comment les discours de propagande pouvaient à ce point aveugler, penses-tu qu’ils se repentent Hector ?



J’ai marché dans les rues de Soweto en te tenant par la main, regardé les bourgs avec de la haine dans l’âme, tu leur avais déjà pardonné dit-on dans les contes de la rédemption. C’est devant qu’il faut marcher et peut-être qu’en ouvrant les yeux sans buée je te verrai courir et je t’entendrai encore une fois chanter « God Bless Africa"

G.